Durant près de 30 ans, les ingénieurs du métro ont imaginé des modes d’exploitation qui se révéleront impossibles à mettre en oeuvre. Des travaux ont pourtant été engagés et de nombreux ouvrages, voies, quais ou stations fantômes témoignent encore aujourd’hui de ce réseau envisagé mais jamais exploité.
C’est peu dire que le métro parisien a été accouché dans la douleur. Des premiers projets à l’ouverture de la ligne 1 le 19 juillet 1900, il s’est écoulé plus de 50 ans. En cause, l’opposition entre les visées des grandes compagnies qui veulent prolonger leurs lignes jusqu’au coeur de la capitale et le conseil municipal qui souhaite un chemin de fer local au service des Parisiens. L’État qui soutient les compagnies s’oppose aussi à la Ville qui apparaît toujours comme une menace pour le pouvoir en place. Depuis les émeutes de 1830, 1848 et bien sûr la Commune en 1871, Paris n’a plus de maire et il est exclu de lui donner trop de pouvoirs, même celui de faire son métro.
Qu’est-ce qu’un métro ?
On pourrait penser que ce temps d’oppositions et de tergiversations a été mis à profit pour définir le meilleur réseau possible, adapté au mieux aux besoins de la capitale. C’est tout le contraire. Durant cette période, les vraies raisons de cette indécision sont méconnues et l’ensemble de l’opinion semble croire que la solution au problème est technique. C’est l’époque des projets multiples, du plus sérieux au plus farfelu, chacun semblant chercher « la bonne solution », celle qui emportera tous les suffrages et décidera définitivement les pouvoirs publics. La vraie question, celle de savoir qui est compétent de l’État ou de la Ville pour engager les travaux du métro, n’est pas tranchée. Elle ne le sera qu’à l’approche de l’Exposition universelle de 1900, quand l’État se résout finalement à laisser la municipalité se débrouiller avec son métro, à charge pour elle de le mettre en service dans les temps. C’est bien tard, en mars 1898, que Paris peut enfin s’engager dans la construction de son chemin de fer. Et pourtant, la première ligne est achevée en près de deux ans, manquant de seulement trois mois l’ouverture de la manifestation.
Bien sûr, ce n’est pas en 1898 que les ingénieurs de la Ville se sont penchés sur le métro. Espérant emporter la décision, la Ville a engagé plusieurs études permettant de définir la nature du réseau et son mode d’exploitation. L’ingénieur en chef, Fulgence Bienvenüe fait le choix audacieux de l’électricité, une énergie encore peu répandue. Les tramways commencent à s’y convertir progressivement après avoir essayé tout un tas d’autres modes de traction, du cheval à l’air comprimé en passant par la vapeur. L’utilisation de l’électricité permet également d’assurer la signalisation qui, bien que mécanique, est alimentée par le courant. Le principe basé sur un cantonnement prévoit que deux signaux fermés successifs protègent chaque train en circulation. La fréquence de