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  • (c) Ch. Ardaillon/ RATP

    Le 10 décembre 1977, les premiers voyageurs se pressent dans la gare de Châtelet-Les Halles

  • (c) RATP

    Au pied de l’église Saint-Eustache dans le trou des halles, le chantier de la gare de Châtelet est déjà bien avancé. Les différents tunnels des futures lignes A, B et D sont creusés, le 26 juin 1975.

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    Devant le Cnit à la Défense en novembre 1966, la future gare du métro régional sort de terre.

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    Saint- Germain-en-Laye, l’ancienne gare des chemins de fer de l’Ouest est reconstruite pour l’arrivée du métro régional, le 10 novembre 1970.

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    La salle des compresseurs sur le chantier de la gare d’Étoile.

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    Une rame MS 61 flambant neuve arrive à Boissy- Saint-Léger ce 13 décembre 1969, jour de l’inauguration de la ligne Nation - Boissy.

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    Les boutiques en forme d’igloos de la gare d’Auber sont furieusement tendance, novembre 1973

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    Le président Pompidou est venu inaugurer la section Étoile - Auber, le 18 novembre 1971.

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    Dès la décision arrêtée, la section centrale Auber - Nation est mise en chantier, vue ici le 16 janvier 1973.

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    Le président Giscard d’Estaing aux commandes de la rame MS 61 2005 lors de l’inauguration du tronçon central le 8 décembre 1977

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    Dans le guide des horaires des lignes A et B à l’automne 1979, le code mission à chiffres est expliqué aux voyageurs

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    Le guide pratique du RER largement distribué en décembre 1977 reproduit le plan des plus grandes gares comme ici Châtelet-Les Halles.

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    Une rame MS 61 rénovée à quai à Charles-de- Gaulle-Étoile le 25 mars 1987

Il y a 40 ans, Châtelet-Les Halles donne naissance au Réseau express régional

30 janvier 2019
- -
Par : Philippe-Enrico Attal

Article exceptionnellement gratuit tiré du numéro 44 d’Historail.

 

Le 8 décembre 1977, le Réseau express régional voit le jour avec la mise en service des lignes A et B en correspondance dans une toute nouvelle gare souterraine, Châtelet-Les Halles.

Au début des années 1960, la France du général de Gaulle a des ambitions. Il lui faut retrouver la place qu’elle a perdue avec la terrible défaite de juin 1940 et l’immobilisme de la IVe République. Le pays est bientôt en pleine mutation, institutionnelle avec la Ve République, mais aussi industrielle et économi­que, pour s’affirmer comme l’une des grandes puissances européennes. C’est l’époque des travaux de prestige et des grandes réalisations technologiques et industrielles.

Au cœur même du pays, Paris n’est pas en reste. Les pouvoirs publics commencent à s’interroger sur le développement de la capitale. La ville est un peu à l’étroit dans ses limites voulues par Napoléon III et la banlieue se développe à grande vitesse pour faire face à la crise du logement. En 1960, 15 ans à peine après la fin de la guerre, les reconstructions, loin s’en faut, ne sont pas encore achevées. La poussée démographique, l’étroitesse des logements populaires parisiens dopent la construction dans le bâtiment. L’effort industriel conduit les grandes entreprises à l’image de Renault à recruter une main-d’œuvre immigrée au sein même des pays africains. Cette population peinera à trouver à se loger ailleurs que dans des bidonvilles qui pullulent en région parisienne. L’arrivée de près d’un million de rapatriés d’Algérie en à peine quelques semaines sans que les pouvoirs publics aient anticipé ce retour massif accentue encore la douloureuse question du logement. Partout dans la région, les programmes fleurissent alors que cinq villes nouvelles, Évry, Cergy, Marne-la-Vallée, Saint-Quentin-en-Yvelines et Melun-Sénart sont créées de toutes pièces pour limiter la croissance de l’hypercentre. De nouveaux centres urbains d’importance voient le jour à l’image de Sarcelles ou La Courneuve. Le gouvernement prévoit la construction de 500 000 nouveaux logements par an. Ce mouvement s’accentue encore quand on décide l’éradication des bidonvilles. Les programmes immobiliers sont parfois imaginés dans la précipitation, à l’image des cités d’urgence, des constructions précaires qui tarderont à disparaître.

Face à ce rapide développement urbain, le réseau historique des trans­ports peine à accompagner le mouvement. Bien souvent, les logements sont construits sur des terrains isolés loin des centres-villes et des lignes de communication. L’accroissement exponentiel du parc automobile ne peut à lui seul assurer une bonne desserte des nouveaux quartiers. Le réseau routier de la région parisienne sature rapidement et un vaste programme de construction de nouvelles autoroutes est lancé. Mais il faut également imaginer les transports publics du Paris de l’an 2000. Dès le début des années 1960, on commence à élaborer des plans pour un nouveau réseau de transports rapides à travers la région.

L’idée n’est pas nouvelle et dès les années 1920, on avait imaginé de nouvelles liaisons régionales qui vien­draient compléter les lignes de train de la banlieue. C’est à cette époque que l’on construit les premiers prolongements du métro au-delà des limites administratives de Paris. Le développement de la petite couronne conduit à engager la modernisation de lignes restées isolées, concentrées sur la seule banlieue comme celles de Sceaux, de Boissy-Saint-Léger, de Saint-Germain-en-Laye ou de Versailles.

Ces réflexions permettent la modernisation la ligne de Sceaux exploitée par le Paris – Orléans entre Luxembourg, Robinson et Limours. La CMP, Compagnie du métro de Paris, qui prolonge à pareille époque son réseau vers Boulogne et Vincennes, reprend l’exploitation de la ligne électrifiée et modernisée. Les nouvelles rames Z inspirées du plus moderne matériel roulant du métro remplacent les anciens convois à vapeur du PO. La métamorphose spectaculaire est suivie d’une explosion du trafic sur la ligne. L’électrification du tronçon initial Luxembourg – Massy-Palaiseau et Robinson est finalement poursuivie jusqu’à Saint-Rémy-lès-Chevreuse, la section terminale vers Limours étant exploitée en navette. Cette mise en service qui intervient en 1938 est malheureusement bousculée par la déclaration de guerre l’année suivante. La mise en place d’un réseau modernisé sur l’ensemble du territoire régional est reportée à des jours meilleurs. La ligne de Bastille à Verneuil-l’Étang qui devait à son tour connaître une modernisation avec électrification attendra encore près de 30 ans.

La traversée de Paris 

Il ne peut y avoir de développement régional sans la construction d’un métro assurant les transports à l’échelle de l’Île-de-France. C’est cette idée qui occupe les esprits dans les cabinets ministériels à la fin des années 50. La réorganisation des départements, le développement des villes nouvelles et des quartiers urbanisés doit s’accompagner d’une nouvelle offre de transports. On commence donc à réfléchir aux contours de ce nouveau réseau avec pour idée principale d’établir de nouvelles traversées du centre de Paris.

Les gares butoirs sont dans le collimateur, largement dénoncées comme un frein à la mobilité. Ces lignes qui convergent toutes vers des terminus parisiens obligent les voyageurs à poursuivre par d’autres modes pour achever leur voyage. Bien souvent, les banlieusards empruntent un train pour rejoindre Paris, un métro pour traverser la ville et un autre train dans une gare parisienne pour arriver sur leur lieu de travail. C’est donc un réseau traversant qui est alors imaginé où les gares terminus s’effaceraient pour poursuivre jusqu’à la destination finale. L’idée des lignes de jonction n’est pas nouvelle. Au milieu du XIXe siècle, le projet de métro (finalement écarté) imaginé par les grandes compagnies de chemin de fer devait déjà permettre de poursuivre son voyage jusqu’au coeur de la ville. Au début même de la construction du chemin de fer, les frères Pereire avaient imaginé que leur gare construite dans le quartier de l’Europe pourrait recevoir tous les trains à destination de la capitale. La constitution des différents réseaux qui voudront chacun leur grande gare parisienne met à mal cette idée d’une gare centrale. Au lieu de traverser la ville, les lignes sont au contraire repoussées en périphérie, les gares établies aux limites des barrières proches des murs d’octroi. Les trains viennent buter dans ces gares qui ne se rapprocheront du centre qu’à la faveur de l’extension en 1860 des limites de Paris. Un siècle plus tard, rien n’a changé. De grandes gares parisiennes comme celle du Nord, de Lyon ou Saint-Lazare sont des pôles majeurs de desserte de la banlieue. Les voyageurs y arrivent par centaines de milliers qui se précipitent ensuite dans le métro qui peine à absorber ce terrifiant trafic. L’idée d’un réseau de lignes traversant Paris de part en part est donc totalement révolutionnaire. Personne ne s’inquiète encore de voir converger toutes les circulations vers la ville centre.

Une première ligne est-ouest 

Les réflexions s’engagent sur une première ligne jugée prioritaire du métro régional. Le cahier des charges impose plusieurs contraintes. Il faut desservir le quartier de la Défense, soulager la ligne 1 du métro totalement saturée, réduire le trafic de la gare Saint-Lazare où convergent chaque jour plusieurs centaines de milliers de voyageurs, le tout à grand gabarit pour permettre à des trains de rouler à 100 km/h. On choisit alors d’établir une liaison est-ouest reprenant la ligne de Saint-Germain-en- Laye à l’ouest jusqu’à Nanterre- La Folie et celle de Bastille vers Boissy- Saint-Léger à l’est. Le métro express desservira également La Défense reliée à Étoile en quelques minutes avant de poursuivre vers Concorde, Châtelet, la gare de Lyon et finalement la ligne de Boissy probablement à hauteur de la gare de Reuilly. Cette première ligne est officiellement mise en chantier le 6 juillet 1961 à l’île de Neuilly où est donné le premier coup de pioche. Dans les faits, les travaux commencent véritablement en 1962. Entre-temps, les contours de la future ligne se précisent et Concorde est délaissée au profit d’une nouvelle gare à Auber proche de l’Opéra et de la gare Saint- Lazare. À l’autre extrémité, c’est finalement Nation qui sera préférée à Bastille avec abandon du tronçon jusqu’à Saint-Mandé.

Cette réalisation voulue par le pouvoir politique est largement subventionnée. Le métro express est appelé à changer les habitudes de transport des Parisiens et leur donner un avant-goût de la révolution engagée. Les nouvelles gares sont monumentales, longues de 225 m quand le métro parisien est souvent limité à 75 m. Les tunnels plongent à grande profondeur pour éviter les différents obstacles, à commencer par le métro, les nappes phréatiques et la Seine. Les tunnels ont un gabarit généreux qui doit faire oublier l’étroitesse du métro parisien.

Malheureusement ces belles promesses sont un peu ternies sur le terrain. Dans les faits, les travaux n’avancent pas très vite, alors que les coûts s’emballent progressivement. En théorie, le programme du métro régional dispose de crédits quasi illimités inscrits au titre des réalisations de prestige de la France industrielle. En coulisse, les pouvoirs publics s’inquiètent bientôt de la lenteur de ce chantier qui tarde à se concrétiser. Au début de la décennie, l’étude d’un nouveau matériel roulant a été lancée, le MS 61, matériel suburbain 1961, destiné à irriguer les nouvelles lignes. En 1967, les premières rames sont livrées alors que la liaison Défense – Étoile est toujours en chantier. Les rames sont affectées à la ligne de Sceaux où elles donnent immédiatement un sacré coup de vieux aux voitures Z imaginées dans les années 30. Quand donc ce nouveau matériel pourra-t-il desservir La Défense ?

Le chantier en réalité s’avère plus complexe que prévu et les journaux bientôt s’amusent des retards qui s’accumulent. Alors que le réseau des transports arrive à saturation, le métro régional semble prendre son temps. Engagé simultanément depuis La Défense et Étoile, le tunnel avance lentement. Début 1964, seuls 155 m de galerie sont creusés. C’est assez inquiétant, d’autant qu’il y a depuis La Défense un autre tunnel à construire pour assurer la liaison côté ouest jusqu’à Nanterre pour l’acheminement du matériel roulant. En cause, la nature des sols mais aussi le manque de sondages préalables et l’emploi de techniques pas encore tout à fait éprouvées. Finalement, il faudra attendre la fin des années 1960 pour envisager une mise en service.

Un réseau qui écarte les lignes SNCF 

Entre-temps, les contours du futur réseau de métro express se sont précisés. Élaboré en 1965, le Sdau (schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme) a défini les lignes à construire sans véritablement tenir compte des coûts engendrés. Le schéma directeur voit grand à l’image des ambitions nouvelles d’une capitale régionale. Le réseau ferré SNCF est largement délaissé au profit de la construction de nouvelles infrastructures. La transversale est-ouest en chantier est dotée de deux antennes, à l’ouest vers Montesson et à l’est en direction de Marne-la-Vallée. Deux autres transversales nord-sud sont imaginées desservant principalement les villes nouvelles, le nouvel aéroport Paris Nord (Roissy) et Orly. Dans Paris, ces deux lignes passent à l’est par Gare-du-Nord, République et Gare-de- Lyon, et à l’ouest par Gare- Saint-Lazare, Invalides, et Gare- Montparnasse. Si le réseau reprend quelques lignes existantes, une bonne part des liaisons nouvelles reste à construire. La ligne de Sceaux prolongée au nord jusqu’au Châtelet est partiellement intégrée. Ce beau réseau s’avère finalement bien complexe et coûteux à réaliser. D’autant que la construction des premiers tronçons du métro régional donne une idée plus précise des difficultés techniques et des coûts engendrés par le projet.

La liaison Étoile – La Défense n’est d’ailleurs pas la seule en chantier. À l’est, la ligne de Bastille vers Boissy- Saint-Léger est en pleine mutation pour établir une nouvelle connexion avec la capitale. Cette ligne qui devait comme celle de Sceaux être modernisée à la fin des années 1930 s’apprête à délaisser les convois à vapeur au profit des nouvelles rames MS 61 après électrification. Les anciennes gares du réseau de l’Est sont rasées pour laisser la place à des bâtiments plus fonctionnels tandis que la gare de Bastille est comme on l’a vu abandonnée pour un nouveau terminus à Nation en correspondance avec le métro. Cette cure de jouvence qui commence au début des années 1960 permet la mise en service de la ligne de Boissy le 14 décembre 1969. Du jour au lendemain, les trains arrivent à la nouvelle gare de Nation, avec ses couloirs interminables et ses escaliers mécaniques qui plongent à grande profondeur dans les entrailles de Paris. Dès son ouverture, la ligne rencontre un grand succès auprès du public. Le contraste est si violent entre les trains à vapeur et les rames MS 61 que le métro régional était assuré d’emporter la partie. C’est le même succès qui est attendu à l’ouest avec l’ouverture de la branche de La Défense. À peine quelques mois plus tard, le 21 février 1970, le métro régional est ouvert, après une mise en service provisoire en avant-première pour le Salon nautique au mois de janvier. Le quartier de la Défense n’est plus qu’à 5 minutes de la place de l’Étoile. Les gares monumentales impressionnent le public par leur gigantisme et leur modernité. C’est l’an 2000 en 1970. L’objectif n’est pas de se limiter à cette courte navette, mais de poursuivre vers le coeur de Paris. Pareillement, la ligne doit se prolonger à l’ouest en reprenant la branche de Saint-Germain-en-Laye de la banlieue Saint-Lazare, soulageant ainsi une gare qui supporte un trafic intense. Avant cela, c’est à l’est que la ligne se prolonge. Le 23 novembre 1971, le métro régional arrive en gare d’Auber dans le quartier d’affaires de l’Opéra à proximité de la gare Saint-Lazare. À l’image de Bienvenüe qui au début du siècle a construit un viaduc souterrain pour permettre à trois lignes de métro de se croiser devant l’Opéra, la gare d’Auber est une véritable cathédrale souterraine. Sa réalisation dans un sous-sol extrêmement contraint est une prouesse technique. Sa très vaste salle d’échanges et ses boutiques en forme d’igloos furieusement contemporains donnent une idée des dimensions retenues pour ce métro régional. Le président de la République en personne, Georges Pompidou, se déplace pour inaugurer cette gare qui se visite comme l’une des nouvelles curiosités de la capitale. Il y a bien quelques voix qui s’élèvent pour dénoncer la démesure dont on a fait preuve, mais elles sont peu entendues. Il y a du prestige dans tout cela et ça flatte l’orgueil national.

Abandonner la jonction centrale Auber – Nation 

Le 1er octobre 1972, la branche de Saint-Germain est mise en service. L’ancienne ligne SNCF a été pareillement reconstruite, ses anciennes gares rasées, ses installations modernisées tandis que le 3e rail a cédé la place à la caténaire. À Saint-Germain, l’ancien BV des chemins de fer de l’Ouest a disparu au profit d’une gare souterraine permettant de reconstituer les jardins du château. Cette nouvelle ligne rencontre pareillement un excellent accueil des voyageurs. Mais ces belles réalisations ont un prix et il est temps de faire un premier bilan. Les pouvoirs publics ont fait leurs comptes et la réalisation du réseau imaginé en 1965 n’est bientôt plus d’actualité. Les coûts exorbitants et les difficultés techniques obligent à voir moins grand. 3,5 milliards de francs ont déjà été engloutis dans l’aventure du métro régional. La réalisation de la jonction centrale est évaluée à plus d’un milliard.

Certains imaginent d’en rester là, avec une ligne Saint-Germain – Auber d’un côté et Nation – Boissy-Saint- Léger de l’autre. La traversée de Paris resterait un doux rêve. C’est pourtant l’essence même du métro régional. Le Premier ministre Chaban- Delmas tout comme le ministre des Finances Giscard d’Estaing plaident pour cette solution. Heureusement, le président Pompidou qui l’a bien compris impose la réalisation de la jonction Auber – Nation avec ses deux gares Châtelet et Gare-de-Lyon. Le réseau de 1965 est revu en profondeur pour faire presque aussi bien mais pour moins cher. On décide alors de réutiliser au maximum les lignes existantes en les adaptant ou en les prolongeant. La grande idée, c’est l’interconnexion des réseaux RATP et SNCF. Elle doit permettre de faire passer par les voies SNCF certains trains du métro régional. Mais cette solution a un coût : 400 millions pour prolonger la ligne de Sceaux vers Châtelet et même 1 milliard pour la faire remonter à Gare-du-Nord. 600 millions supplémentaires sont nécessaires pour connecter les deux réseaux RATP et SNCF auxquels il faut ajouter 150 millions pour augmenter la capacité de la gare centrale de Châtelet.

La solution passe avant tout par de nouvelles sources de financement. C’est à cette occasion qu’est créé le versement transports payé par les entreprises pour financer les nouvelles infrastructures. En novembre 1972, le feu vert est donné avec un nouveau schéma qui retient quatre lignes axées sur trois transversales, est-ouest, nord-sud et rive gauche. Bien que revu à la baisse, le chantier de ce nouveau réseau est colossal. Il y a 9 km de tunnel à construire au coeur de Paris, et deux gares souterraines aux dimensions hors normes, Châtelet-Les Halles et Gare-de-Lyon.

La plus grande gare d’Europe dans le trou des Halles 

Le coeur du nouveau réseau est une nouvelle gare monumentale dans le quartier des Halles. En 1969, le déménagement des Halles de Paris vers Rungis est achevé. Les anciens pavillons Baltard laissent la place à un vaste chantier qui fera longtemps parler de lui. Que faire du trou des Halles ? Dans les faits, une bonne part des délais imposés sur ce chantier est liée aux travaux du métro régional alors que le grand public s’étonne qu’on ne rebouche pas rapidement ce trou béant. C’est là pourtant que se construit à ciel ouvert une réalisation gigantesque, la future gare du RER, Réseau express régional, la nouvelle appellation du métro express. Trois courants de trafic y sont attendus, une ligne est-ouest, et deux lignes nord-sud. La gare comportera donc sept voies, deux pour chaque transversale, futures lignes A et B et trois pour l’itinéraire est-nord de la SNCF, la future ligne D. La même idée de séparation des trafics conduira à la construction des deux gares souterraines à Gare-de-Lyon, l’une SNCF et l’autre RATP. Pourtant, on pourra regretter aujourd’hui que les gares du tronçon central entre Nation et La Défense ne comportent que deux voies plutôt que quatre. Mais il est indéniable que le trafic attendu sur ces nouvelles lignes a été largement sous-estimé. Personne n’aurait parié alors sur le 1,2 million de voyageurs quotidiens de la ligne A.

C’est sans inquiétude qu’on imagine de reprendre l’idée abandonnée au début du XXe siècle par les pères du métro de faire passer les trains d’une ligne à l’autre dans la même infrastructure. Ainsi, le tunnel entre Châtelet-Les Halles et Gare-de-Lyon doit être commun aux lignes A et D, comme celui entre Gare-du- Nord et Châtelet-Les Halles, commun aux lignes B et D. Cette erreur de conception retardera la mise en service de la ligne D et pose encore aujourd’hui de sérieux problèmes d’exploitation entre Gare-du-Nord et Châtelet-Les Halles.

La réalisation de la jonction centrale porte sur les trois lignes alors en service, Auber – Saint-Germain-en- Laye, Nation – Boissy-Saint-Léger mais également sur la ligne de Sceaux Luxembourg – Saint-Rémy-lès-Chevreuse et Robinson. Pour être exact, il faut y ajouter la jonction Châtelet- Les Halles – Gare-du-Nord qui entre en travaux à partir de 1976. En 1971 a également été décidée la construction d’une antenne vers Marne-la-Vallée. À l’origine, on prévoyait de construire la gare de Châtelet- Les Halles à cinq voies, deux pour la ligne A, deux pour la ligne B et une voie arrivée supplémentaire. C’est la prise en compte d’une future ligne D qui conduit à établir sept voies à quai imposant des dimensions prodigieuses. La largeur est portée de 62 à 80 m tandis que la longueur des quais de 225 m des lignes A et B monte jusqu’à 320 m pour la ligne D. La gare construite à 25 m de profondeur doit être surplombée d’un ensemble de galeries commerciales de 50 000 m2, le Forum des Halles, qui ouvrira en 1979. La gare de Châtelet-Les Halles est également un pôle de correspondance avec le métro. Pour l’occasion, la ligne 4 est détournée abandonnant son ancien tracé vers une station Les Halles intégrée dans le nouveau complexe. Les travaux commencés en 1973 s’achèveront en 1975 avec le bétonnage des différents niveaux. L’ensemble de l’ouvrage qui se situe à hauteur de la nappe aquifère obligera à établir une ceinture de parois de soutènement tout autour de la fouille pour protéger le site et assurer la stabilité des constructions alentour.

Gare-de-Lyon, l’autre cathédrale du RER 

Si les esprits se focaliseront longtemps sur les dimensions de la gare de Châtelet-Les Halles, celle de Gare-de-Lyon constitue elle aussi une prouesse technique. Au départ, le projet d’établir cette nouvelle gare du RER a plutôt mal commencé. Les deux entreprises publiques RATP et SNCF n’ont pas encore la culture du partage et les rivalités sont nombreuses, peut-être parce que la notion même de métro régional semble une prérogative de la seule RATP. À l’heure de dresser les plans de cette nouvelle gare souterraine, chacune des deux entreprises commence à travailler de son côté, se jugeant sans doute seule compétente sur le dossier. Quand les pouvoirs publics découvrent que deux projets sont sur les planches à dessin, ils obligent les opérateurs à coopérer. Difficile en réalité tant la culture ferroviaire est différente. L’idée de l’interconnexion qui semble simple sur le papier est en réalité assez complexe à mettre en oeuvre. Les différences sont partout, dans les grandes lignes comme dans les détails. Les modes d’exploitation, la signalisation, le courant de traction compliquent la fusion des réseaux. À Gare-de-Lyon la nouvelle gare est construite à ciel ouvert sur le côté de la rue de Bercy. L’ancienne halle attenante à la tour de l’Horloge est rasée pour laisser la place à un ensemble immobilier comprenant un hôtel et des bureaux. La gare est creusée dans une fosse de 315 m sur 41,70 m, le tout jusqu’à une profondeur de 27,50 m. L’ensemble au final comporte six niveaux. Au plus profond, on trouve la gare de la ligne A, dotée d’un large quai central de 21,70 m desservant deux voies. On pourra regretter que l’espace de ce quai n’ait pas été utilisé pour doter la gare de quatre voies. La gare SNCF située juste au-dessus comporte quant à elle quatre voies dont deux destinées à la future ligne D, les autres permettant de reporter en sous-sol une partie du trafic banlieue. À l’ouverture de cette gare, les quais longs de 315 m donnent accès à quatre voies en impasse. Cette situation en cul-de-sac sera en partie responsable de la catastrophe du 27 juin 1988 où une rame descendue dans la gare souterraine viendra percuter un train à quai. La gare banlieue SNCF ne sera mise en service qu’à partir de septembre 1980, libérant les voies C, D, E et F de surface, permettant l’année suivante l’exploitation des TGV.

La gare souterraine banlieue est surplombée d’une salle d’échanges permettant de rejoindre la ligne 1 du métro et la gare de surface. Un espace technique supplémentaire acteurs du monde des transports, le grand public est resté focalisé sur le trou des Halles qui tarde à se reboucher. Les médias n’ont pas vraiment communiqué sur ce qui se passait dans l’ancien ventre de Paris, à part peut-être pour évoquer le tournage d’un western, Touche pas à la femme blanche !, entièrement réalisé dans le trou des Halles. C’est dire si la surprise a été grande quand l’annonce a été faite de l’ouverture d’un Réseau express régional en lieu et place du métro express. Les trois anciennes lignes n’en forment plus que deux, les A et B, en correspondance dans la plus grande gare souterraine d’Europe, Châtelet-Les Halles. L’événement est largement médiatisé, d’autant que l’inauguration le 8 décembre 1977 a lieu en présence du président de République, Valéry Giscard d’Estaing. L’ancien ministre des Finances qui s’alarmait en 1972 des coûts exorbitants d’une jonction centrale entre Auber et Nation semble désormais tout acquis au nouveau réseau. Le train inaugural parti d’Auber à 10 h 40 file vers Châtelet-Les Halles pour rejoindre le nouveau terminus de Noisy-le-Grand-Mont-d’Est. Le train est suivi de près par l’autorail SNCF X 2919 pour permettre, si nécessaire, l’évacuation des personnalités. De là, la rame MS 61 repart vers Châtelet-Les Halles, le coeur du nouveau réseau. Le président, privilège de la fonction, en a profité pour prendre les commandes de la rame, avec une conduite un peu brutale diront les mauvaises langues. C’est donc dans la nouvelle gare que l’inauguration officielle a lieu, le président rappelant pour l’occasion que l’État a su tenir ses engagements en contribuant financièrement à cette réalisation à hauteur de 2,3 milliards de francs. Alors que l’inauguration est largement reprise dans les médias, que des émissions spéciales sont réalisées par la télévision, le public n’est toujours pas autorisé à descendre à la découverte de Châtelet- Les Halles. Il lui faudra être encore un peu patient puisque c’est seulement le 10 décembre, 48 heures après l’inauguration, que le RER est enfin mis en service. L’accueil des premiers voyageurs, impressionnés par le gigantisme des installations, est évidemment enthousiaste.

Les nouvelles lignes A et B déconcertent un peu ceux qui étaient habitués à descendre à Nation, Luxembourg et Auber. Cette traversée de Paris qui bouleverse les habitudes réduit également spectaculairement les temps de parcours. Il ne faut plus que 18 minutes pour aller de Vincennes à la Défense. Au coeur même de Paris, les gares de Nation et Étoile sont reliées en 11 minutes. Le voyageur parisien peut utiliser le RER avec un simple ticket de métro, et la nouvelle ligne A qui suit de près le parcours de la ligne 1 permet de faire baisser son trafic de façon sensible. Néanmoins dans les faits, les temps nécessaires pour rejoindre les quais de gares construites à grande profondeur limiteront l’usage du RER pour les trajets intra-muros.

Expliquer le RER 

La difficulté pour les nouveaux voyageurs est de se repérer dans ce labyrinthe tant les anciennes habitudes restent ancrées. La RATP communique largement pour expliquer au public le fonctionnement de ce nouveau réseau. Un guide pratique est diffusé qui reprend le schéma des nouvelles lignes et donne des informations sur le mode d’emploi au quotidien. Tout est nouveau, les schémas de desserte, les gares, la tarification… Les trains, omnibus dans Paris, peuvent brûler certaines gares de banlieue. Une première ébauche de codes missions fait son apparition. Pour l’heure, le système est encore assez complexe puisqu’il se base sur des chiffres plutôt que des lettres. Sur la ligne A, par exemple, dans le sens est-ouest, le premier chiffre indique un terminus. Le 1 est pour Saint-Germain, le 5 pour Le Vésinet-Le Pecq, le 7 pour Rueil-Malmaison, le 9 pour La Défense.

Si le second chiffre est un 1, toutes les gares sont desservies, si c’est un 2, Nanterre-Préfecture et Nanterre- Ville sont brûlées, s’il est suivi d’un 3, Fontenay, Vincennes, Chatou et Le Vésinet-Centre ne sont pas desservies. Si c’est un 8, ce sont Chatou et Le Vésinet-Centre qui sont délaissées.

Il faut vraiment être un habitué pour s’y retrouver, mais c’est déjà un progrès. Plus tard, l’introduction de codes missions à quatre lettres simplifiera grandement le système.

Il faut également expliquer le réseau qui est en train de se construire aux quatre coins de la région. Le guide de la RATP présente la contexture du RER à l’horizon 1985, une vision encore un peu optimiste qui prévoit des lignes et des antennes qui tarderont à être livrées.

S’orienter dans les gares est une autre difficulté. Châtelet-Les Halles est de loin le nouveau labyrinthe où il faut retrouver son chemin. La gare est en correspondance avec le métro, la ligne 4 à la station Les Halles, les lignes 1, 7, 11 à la station Châtelet. En réalité, seule la 4 est véritablement en correspondance avec le RER, les autres lignes étant rejointes par un long couloir doté de trottoirs roulants. À l’origine, les concepteurs de la gare avaient imaginé d’orienter les voyageurs à l’aide de la couleur du carrelage de la salle d’échanges située au-dessus des voies. Ce code n’indiquait pas des directions mais des points cardinaux, ce qui au final limitait son intérêt. Les notions est-ouest et nord-sud n’étant pas forcément la première référence des voyageurs, ce mode d’orientation, bien que présent sur les faïences, ne fut jamais exploité.

Un réseau C, D, E… 

Une fois retenu le principe de l’interconnexion, les contours du nouveau réseau se précisent. De nouvelles branches peuvent venir s’ajouter aux lignes existantes ou à construire, limitant le coût des travaux à engager. Néanmoins, le principe pose bientôt la question de la capacité des sections centrales de ces lignes à multiples branches. Sur les troncs communs, l’exploitation et la régulation s’avèrent encore aujourd’hui extrêmement délicates, le moindre incident conduisant à des retards en cascade.

Après l’ouverture de la ligne B jusqu’à Châtelet, il manque encore la section nord qui doit remonter vers Gare-du-Nord avant de poursuivre vers l’aéroport de Roissy. Il faut d’abord construire une nouvelle gare souterraine à Gare-du-Nord qui permette de recevoir les trains de la B et de la future ligne D. Sur les plans distribués au public en 1977, les destinations au nord de cette ligne D restent à préciser et on ne sait pas encore quelle branche de la banlieue y sera raccordée. Le prolongement de la ligne B nécessitera la mise en service de nouvelles rames d’interconnexion, le MI 79. Après l’arrivée de la ligne B à Gare-du- Nord en décembre 1981, les nouveaux trains permettront, à partir de 1983, de poursuivre vers Roissy et Mitry donnant véritablement naissance à l’interconnexion. La deuxième étape de cette interconnexion interviendra avec l’ouverture de la branche de Cergy en mai 1988 sur la ligne A, où les trains poursuivront sur l’infrastructure SNCF. En mai 1989, c’est la branche de Poissy qui est raccordée au RER.

Sur la ligne A, le prolongement à l’est vers Torcy, dont Noisy-le-Grand n’est qu’une étape, est bientôt en travaux. Là, le RER arrive pour une fois avant l’urbanisation, chose assez rare dans notre pays. La ville nouvelle de Marne-la-Vallée est encore largement à construire et la ligne de RER favorisera son développement. Son ouverture interviendra en décembre 1980.

Mais avant même la mise en service de ces branches, une nouvelle ligne C est mise en service en septembre 1979. Sa particularité est d’être totalement exploitée par la SNCF alors que la notion même de RER était jusqu’alors une prérogative RATP. La ligne est réalisée par un tunnel de jonction de 841 m entre les gares d’Invalides et d’Orsay jusqu’alors en cul-de-sac. Elle permet de mettre en service de nouvelles liaisons traversant Paris. Mais les voyageurs seront un peu déconcertés par cette nouvelle ligne SNCF. Pas de gare cathédrale à l’image d’Auber ou de Châtelet. Pas de rames bleues MS 61 non plus jusqu’alors synonyme de RER, même si les Z de la ligne B venaient contredire ce principe. Là, ce sont des Z 5400 inox qui assurent le trafic. Le principe même du RER est pourtant bien là, créer une ligne traversant Paris de part en part reliant entre elles différentes banlieues. La ligne C en réalité est le résultat du plan mis en oeuvre en 1972 de l’interconnexion, faire du RER à moindre coût en réutilisant au maximum les infrastructures existantes. Ces lignes-là datent du début du XXe siècle pour leur section parisienne, construites à l’origine pour la desserte de l’Exposition universelle de 1900. Si l’infrastructure existe, il y a tout de même d’importants travaux à réaliser. La ligne des Invalides est encore exploitée par 3e rail, et semble restée figée dans sa configuration des années 1950. Côté Orsay, le coup d’envoi a véritablement été donné en 1969 avec la construction de la gare souterraine banlieue d’Austerlitz, la première de la région parisienne. Sa mise en service a permis de mettre fin à la traversée à niveau de la gare par les trains pour Orsay. Outre le tunnel construit en bord de Seine, il a fallu établir de nouvelles gares à Invalides et Orsay devenues passantes. Établies à quatre voies, elles permettent de fluidifier le trafic tandis qu’Invalides peut être utilisé comme terminus intermédiaire. La réélectrification de la ligne des Invalides a mis un terme à l’exploitation des rames Standard de la banlieue ouest désormais limitées à la ligne d’Auteuil et à la liaison Puteaux – Issy-Plaine.

Plus concrètement, la ligne C donne une idée des contours futurs du réseau de RER qui se développera en grande part à partir d’infrastructures de la SNCF. La nouvelle branche de Cergy, comme la VMI (Vallée-de- Montmorency – Invalides) branche nord de la C, sont bien des infrastructures SNCF. Même chose pour la ligne D, mise en service par étapes, limitée dans un premier temps de Villiers-le-Bel à Châtelet-Les Halles. L’idée de faire aussi bien pour moins cher va d’ailleurs rapidement montrer ses limites. Le trafic toujours croissant de la ligne A démontre l’impossibilité de faire passer dans ses tunnels les trains de la ligne D vers Gare-de-Lyon. Il faudra donc construire une nouvelle galerie dédiée pour permettre à la D de se prolonger sur la banlieue sud. Pareillement au nord, entre Châtelet- Les Halles et Gare-du-Nord, le tunnel partagé par la B et la D arrive à saturation. Les études ont montré que son dédoublement reviendrait à un milliard d’euros.

C’est précisément la saturation de la ligne A qui a conduit à mettre en chantier une nouvelle ligne E ouverte en 1999. Reprenant les lignes de Chelles et Tournan de la banlieue est, elles desservent deux nouvelles gares Magenta, dans le complexe Gare-du-Nord et Haussmann en correspondance avec Auber et la gare Saint-Lazare. À l’origine, il était prévu que la ligne soit prolongée en souterrain jusqu’à Pont-Cardinet avant de reprendre l’une des lignes de la banlieue Saint-Lazare, l’actuelle L sud. Au final, la saturation de la ligne A conduit à prolonger la ligne E en parallèle, desservant depuis Haussmann, Porte-Maillot, La Défense et Nanterre. Attendue pour 2022, ce sera sans doute la dernière traversée de Paris.

Aujourd’hui, la notion de RER est devenue un peu floue pour les voyageurs. Le réseau de banlieue a été réorganisé en lignes H, J, K, L, N, P, R et U qui suivent la nomenclature du RER. L’arrivée de trains modernes à l’image du Francilien brouille les cartes. Des enquêtes réalisées montrent que les voyageurs ne savent plus très bien ce qui distingue le réseau RER des autres lignes. La traversée de Paris présentée comme révolutionnaire en décembre 1977 s’est tellement banalisée qu’elle n’est plus visible par le public. Île-de- France Mobilités en tire les conclusions et s’interroge sérieusement sur le maintien du terme de RER qui céderait la place à celui de trains déjà en vigueur pour les autres lignes. Le RER qui fête ses 40 ans est peut-être déjà tout simplement mort.


Une tarification magnétique

En 1969, lors de l’ouverture de la ligne Nation – Boissy-Saint-Léger, une nouvelle tarification entre en service. Le poinçonneur des Lilas est déjà condamné mais il fera de la résistance sur le métro jusqu’en 1975. Après les premiers essais de tickets à bande magnétique aux stations Porte-de-Vanves et Nation en 1968 et 1969, le système commence à se généraliser. Sur le métro régional, impossible de conserver le ticket perforé et on équipe dès l’origine les stations de portillons à tourniquets avec valideurs où le voyageur introduit son billet. Des appareils de vente sont installés à l’arrivée sur le réseau régional. Le voyageur choisit sa gare que la bande magnétique intègre sur le billet, permettant à l’arrivée de franchir les barrières du contrôle de sortie. Mais il n’y aurait sans doute pas eu de RER sans l’introduction en 1975 de la Carte Orange. L’abonnement qui divise la région en cinq zones permet des voyages illimités sur les réseaux RATP, SNCF et bus APTR concrétisant l’intermodalité voulue par le nouveau réseau.

(c) Pilloux/Photorail

Les stations du métro régional sont équipées dès leur ouverture
de tourniquets pour billets magnétiques, comme ici à Rueil-Malmaison
en octobre 1972.


 

Merde au RER !

Non, Historail ne vient ici dans un coup de folie d’insulter le RER. Il faudrait plutôt dire « Du Merde au RER ». C’est une histoire qu’on se raconte comme une bonne blague qui, si elle a des chances d’être vraie, n’est mentionnée par aucun des auteurs sérieux ayant écrit sur les transports parisiens. On restera donc prudent quant à sa véracité, à moins qu’un lecteur bien informé puisse nous en apporter la preuve formelle.

Il se raconte donc que la mise en service de la branche ouest du métro régional en 1970 a failli faire bien rire la France entière et peut-être décrédibiliser le nouveau métro. La France qui adore les sigles avait choisi de désigner la liaison Étoile – La Défense sous l’appellation de « Métro Express Régional Défense Étoile », au moins jusqu’à l’intégration de la branche de Saint-Germain. Rien à redire sauf peut-être un petit détail remarqué, dit la légende, par un peintre en lettres inscrivant le nouveau sigle à quelques jours de l’inauguration. Les lettres formaient un mot cher à Cambronne, MERDE. En catastrophe, tout a été rectifié et c’est, dit-on, la raison d’un basculement de la notion de métro régional vers celle de RER.


Roger Tallon, le couturier du RER

On connaît l’implication de Roger Tallon dans les transports. On sait moins ce qu’il a apporté au RER. En 1976, la RATP fait appel à lui pour imaginer la signalétique du RER. Il faut créer un logo, des signaux repérables par les voyageurs et dessiner le plan du réseau. C’est à lui que l’on doit le sigle RER placé dans un cercle décliné par la suite sur les autres réseaux, métros, tramways et bus. C’est également lui qui choisit de désigner les lignes par des lettres A, B, C, D ayant chacune sa couleur. L’autre innovation de taille sera de dessiner un plan avec une cohérence géographique mais sans tenir compte des distances réelles. Le RER étant appelé à se développer, cette facilité permettra d’intégrer les nouveaux prolongements. C’est également Roger Tallon qui imagine le code mission désigné par des lettres. Il viendra progressivement par ses doux noms de ZEUS, NELY ou TNOR remplacer le code chiffres assez complexe appliqué dans les premiers temps.

 

Le plan du réseau de RER en décembre 1977 et en 1983 après le prolongement au nord de la ligne B et la création de la ligne C. Roger Tallon a dessiné le logo du RER et imaginé un plan qui permet d’intégrer facilement les extensions (DR/Coll. Ph.-E. Attal).

(c) DR/Coll. Ph.-E. Attal         (c) DR/Coll. Ph.-E. Attal


 

Des rames Z au MI 09, un matériel adapté

Les rames Z mises en service sur la ligne de Sceaux en 1938 sont sans doute le premier matériel du RER. Elles vont rouler jusqu’en 1988 sur la ligne B, poursuivant jusqu’à Gare-du-Nord. Mais c’est véritablement le MS 61 qui incarne le mieux le RER. Arrivé en 1967 sur la ligne de Sceaux, il va circuler jusqu’en avril 2016, finissant sa carrière sur la ligne A sur des missions Saint-Germain – Boissy. Le RER en réalité n’aurait pas pu se faire sans les matériels d’interconnexion. Le MI 79 qui roule toujours sur la ligne B va permettre de passer du territoire RATP au réseau SNCF, se jouant des frontières, de la tension du courant de traction, de la signalisation, de la hauteur des quais. À Gare-du-Nord comme à Nanterre-Préfecture, les conducteurs RATP et SNCF vont passer la main à leurs collègues pour permettre aux rames de poursuivre vers leur terminus. Le MI 79 prolongera la ligne B vers Roissy tout comme le MI 84 ouvrira le réseau SNCF vers Cergy et Poissy à la ligne A. Aujourd’hui, cette ligne A est exploitée par les MI 2N et MI 09, rames d’interconnexion à deux niveaux indispensables pour faire face à l’affluence de la ligne.

chatelet20


 

La ligne F du RER

Il reste peut-être encore une ligne de RER à construire. La ligne F imaginée au schéma directeur de 1965 entre les banlieues Saint-Lazare et Montparnasse avec une gare intermédiaire à Invalides est toujours dans les cartons. La saturation de la ligne 13 pourrait d’ailleurs décider à terme de sa réalisation. L’idée paraît tout aussi logique que séduisante. Les deux dernières gares restées en dehors du concept de RER (même si certaines lignes de Saint-Lazare ont été intégrées), formeraient une ligne F donnant correspondance aux lignes A et E à Saint-Lazare et C à Invalides. Néanmoins, la priorité accordée pour l’heure au Grand Paris Express repousse à long terme une telle réalisation même si l’indice F lui reste réservé.


Bibliographie

• Jean Robert, Notre Métro

• Marc Gayda et Claude Bordas, De Saint-Germain-en-Laye à Marne-la-Vallée

• Gaston Jacobs, Les Automotrices Z

• Bernard Collardey, Les Trains de banlieue (tome II)

• Fabienne Waks et Sylvie Setier, L’Épopée du RER de A à B

• La Vie du Rail n° 1627, 22 janvier 1978, « RER. Premiers rendez-vous au Châtelet ».

 

Cet article est tiré du numéro 44 d’Historail que vous pouvez acheter en cliquant sur la couverture :

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