En Normandie dans le pays de Caux, les registres d’état civil de Longueville renferment un acte singulier, à savoir le décès d’un inconnu. Le 9 juillet 1902, le garde champêtre ainsi que le boulanger du village vont en mairie pour déclarer la mort d’un homme, survenue la veille. Le défunt est « âgé d’environ quarante à quarante-cinq ans », a les cheveux et la moustache « grisonnants » et une « figure osseuse ». Il est stipulé que : « l’index de la main droite manque ainsi que la première phalange du pouce de la même main ». Arrivent ensuite dans la description des vêtements portés : un pantalon de coutil rayé bleu et blanc, une blouse bleue et un gilet rayé marron à manches noires qui recouvrait une chemise et de « mauvaises galoches ». Enfin le lieu du décès, la voie ferrée, est précisé. Grâce à la presse locale on est en mesure de retracer l’accident qui a coûté la vie à cette personne il y a 120 ans dans le petit village cauchois.
À 10 km de là, se déroule le jour mentionné une foire aux chevaux, la « Grande-Trotterie » de Bacqueville. Parmi les visiteurs, qui viennent parfois de loin, les frères Léon, marchands parisien, sont venus faire l’acquisition de six bêtes destinées à leur clientèle. Deux hommes sont alors missionnés pour transporter les animaux jusqu’à la gare de Longueville, d’où ils devront partir dans un wagon-écurie accroché au train arrivant de Dieppe. Pour permettre le couplage, la seconde voie de chemin de fer a dû être traversée par ce wagon que poussent plusieurs personnes, dont les deux hommes ayant conduit les chevaux jusqu’à cette gare. C’est alors qu’un train arrivant en sens inverse percute « à une vitesse d’environ 70 kilomètres à l’heure » le wagon dans laquelle se trouvaient les équidés. Suite à cela, le wagon-écurie est retrouvé « en miettes » tandis que la locomotive du rapide a en partie déraillé.